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L’hydrogène, carburant idéal pour nos voitures?

L'hydrogène pourrait-il être une solution pour faire baisser les émissions de CO2 de nos voitures? Comment fonctionne cette technologie méconnue?


Dans la course à la baisse des émissions de CO2 et de la consommation, les voitures électriques semblent être les mieux armées. Pourtant, pour certains, l'hydrogène pourrait être une meilleure solution encore. Comment ça marche ? Vers où va-t-on? Focus sur une technologie encore méconnue...

voiture à hydrogène


Parmi les carburants utilisés en Belgique pour nos véhicules, l'essence et le diesel s'accaparent plus de 90% des parts de marché selon la Febiac. Les hybrides, gaz naturel et électriques se partagent le restant. Mais les hybrides plug-in et électriques progressent rapidement depuis plusieurs mois.


Et l'hydrogène? Pour l’heure, ce carburant n'est quasiment pas représenté chez nous. Normal, les pompes sont peu nombreuses et les modèles disponibles au nombre de... 2 ! Il s'agit de la Hyundai Nexo et de la Toyota Mirai récemment renouvelée.


Pourquoi cette offre famélique? Pourquoi certains prédisent malgré tout un grand avenir à ce carburant alors que d'autres le décrient vertement? Eléments de réponse.


L'hydrogène, c'est quoi?

L'hydrogène est l'élément chimique le plus abondant de l'univers. Il s'agit d'un corps simple, gazeux, qui entre notamment dans la composition de l'eau. Mais il n'existe pas à l'état pur. Pour le produire, il faut utiliser des procédés chimiques pour le séparer des autres éléments.


Comment produit-on de l'hydrogène?

Il faut une source d'hydrogène et une source d'énergie. L'hydrogène peut être fabriqué par “vaporeformage” de gaz naturel, par électrolyse de l'eau, par gazéification et pyrolyse de biomasse (déchets verts ou ménagers), par décomposition thermochimique de l'eau, ou à partir d'algues ou de bactéries.


Entre l'utilisation d'énergies fossiles ou le recours à des énergies vertes, la production de l'hydrogène présentera un bilan carbone et environnemental très différent! C'est l'un des reproches formulés par ses détracteurs.


Un exemple vertueux serait celui de la Suisse qui utilise l'énergie hydraulique comme source d'électricité. L'hydrogène est produit par électrolyse et transporté dans des remorques tubulaires jusqu'à la station de ravitaillement en hydrogène.

Hydrogène pour les camions projet Hyundai en Suisse 2020
Les étapes du projet Hyundai en Suisse, lancé en juillet 2020.


Transporter et stocker l'hydrogène, un vrai casse-tête

L’hydrogène étant moins dense que l’air, il occupe bien plus de place: sous forme gazeuse à pression ambiante, cela représente 12 m3 pour un seul kilogramme. Pour le stocker, il faut donc le comprimer (de 200 à 700 bars selon les cas). Malgré ça, comptez l’équivalent de 20 camions-citernes pour transporter la même quantité d’énergie qu’un camion d’essence.


Se pose aussi la question du risque de fuite avec ce gaz extrêmement volatil. À toutes les étapes, de sa fabrication jusqu'au réservoir de la voiture, cela implique une technologie et beaucoup de soins. Bref, loin d'être aussi simple que de remplir son réservoir de 95 ou de diesel!


Comment fonctionne une voiture à hydrogène?

On l'appelle voiture à pile à combustible ou à hydrogène en français, Fuel Cell en anglais ou encore brandstofcel en néerlandais. Des mots qui diffèrent mais un fonctionnement qui reste le même.


La voiture dispose de plusieurs réservoirs capables d'accueillir, sous pression, l'hydrogène délivré par une pompe à carburant (voir plus loin). L'hydrogène est transformé en électricité par la pile à combustible et l'électricité est dirigée vers des batteries tampons.


À partir de là, il s'agit d'une voiture électrique classique, avec un ou des moteurs qui font tourner les roues. L'avantage de produire ainsi de l'électricité, c'est que l'autonomie est élevée (de 400 à 700 km selon les modèles). Et surtout, le plein s'effectue en moins de 5 minutes! En comparaison, il faut au minimum 30' en charge rapide pour récupérer 80% de batteries d'une voiture électrique - et même plusieurs heures sur le réseau domestique.

Voiture à hydrogène
La pile à combustible, les réservoirs et les moteurs électriques, composants essentiels d’une voiture fonctionnant à l’hydrogène.


Comment fonctionne une pile à combustible?

Un atome d'hydrogène comprend des ions positifs et des électrons négatifs. L'oxygène (O2) est pompé à travers la cathode, attirant les atomes d'hydrogène (H2) qui sont introduits à l'anode.


Pour atteindre l'oxygène, les atomes d'hydrogène doivent traverser un électrolyte ou une membrane qui bloque leurs électrons. Ces électrons sont forcés de passer dans un autre circuit qui produit de l'électricité. Les ions (H+), quant à eux, traversent l'électrolyte pour atteindre les atomes d'oxygène avec lesquels ils se lient pour former l'eau (H2O). Au final, outre la production d'électricité, la pile à combustible ne rejette que de l'eau par le pot d'échappement.

Hydrogène pile à combustible


Des prix encore prohibitifs

L'utilisation de l'hydrogène pour produire de l'électricité n'est pas neuve. Nous nous souvenons de nos premiers essais fin des années 90 avec une Opel Zafira1 ou des Santa Fe (Hyundai) et F-Cell (Class A) chez Mercedes en 2002. À cette époque, beaucoup pensaient que l'avènement de la pile à combustible adviendrait vers 2010, au plus tard 2015 avec une mise sur le marché au plus tard pour 2020…


Aujourd’hui, la technologie liée à l'hydrogène est parfaitement au point, les véhicules sont efficaces, sûrs et beaucoup plus fiables que par le passé. Mais leurs prix sont encore à des années lumières de ce que pourrait se permettre un automobiliste particulier. Le gros SUV Hyundai Nexo est vendu près de € 82.000, et la nouvelle Toyota Mirai est à €63.920. Un prix en baisse de plus de 15.000€ par rapport à la précédente génération!


Bref, il faudra encore du temps et l'arrivée de concurrentes, chinoises notamment, pour parvenir à un prix équivalent aux électriques actuelles.

voiture à hydrogène premiers modèles
Début des années 2000, l’un des premiers modèles à pile à combustible. A l’époque, le coffre était quasi entièrement occupé par le système d’alimentation.


Le problème de l'approvisionnement

En Belgique il n'existe actuellement que 3 stations d'hydrogène: à Zaventem pour Air Liquide,à Halle et Haasrode pour Dats 24, la marque de Colruyt. Le groupe belge croit d'ailleurs beaucoup en ce carburant et 4 autres stations sont prévues cette année: Erpe-Mere (Alost), Wilrijk (Anvers), Herve (Liège) et Ollignies (Lessines). Il faut dire que l'hydrogène pourrait bien révolutionner le transport routier (voir plus bas).


Ailleurs en Europe, l'Allemagne investit massivement dans cette énergie avec près d'une centaine d'implantations, loin devant les Pays-Bas, l'Autriche ou le Danemark avec moins de 10 unités chacun. Bref, vous ne pourrez pas traverser l'Europe, surtout vers le sud avec une voiture à pile à combustible.


Les prix du carburant à la pompe? En Belgique, l’hydrogène est au prix de € 9,9/kg. À titre d'exemple, la Toyota Mirai peut parcourir 650 kilomètres avec les 5,6 kilos d'hydrogène dans ses réservoirs. Soit l'équivalent, en termes de coûts, d'une (grosse) berline à essence.

L’hydrogène pour les camions?

Le réseau de distribution, le prix des voitures, le remplissage des réservoirs... Autant de points qui ralentissent le développement de cette technologie. Mais il est un domaine où l'hydrogène et la pile à combustible pourraient trouver un débouché plus évident: les camions. Le transport routier "lourd" utilise essentiellement du diesel et émet d'énormes quantités de gaz à effet de serre et autres polluants. Des groupes d'envergure mondiale s'y intéressent donc.


Ainsi, Hyundai expérimente sur le territoire suisse une flotte de camions baptisés XCient (30 tonnes). Pourquoi la Suisse? À cause de la redevance sur le trafic des poids lourds (LSVA), qui ne s'applique pas aux camions zéro émission. Cela équilibre les coûts de transport par kilomètre d’un camion à pile à combustible par rapport à un camion diesel classique. Ces XCient sont dotés de 2 piles à combustibles de 95 kW chacune. Le réservoir de 32 kg permettrait 400 km d'autonomie selon le constructeur coréen.


Vu la taille de l'engin, on peut imaginer un doublement de ces réservoirs et donc une autonomie plus acceptable pour ce type d'utilisation. L'expérience a débuté en juillet dernier. D'autres constructeurs semblent intéressés par ces perspectives.


Autre piste intéressante: les transports en commun. La firme belge Van Hool s'investit dans les autobus à hydrogène. Des expériences grandeur nature existent depuis plusieurs années, comme à Pau ou à Cologne.

hydrogène pour les camions


Conclusion

L’hydrogène n’est ni la solution miracle ni une technologie à rejeter. La clé du "problème" hydrogène c'est bien sa production et son transport. S'il est fabriqué grâce à des énergies renouvelables, il s'agit d'un atout de taille. Car, même si c'est plus compliqué que pour des carburants fossiles comme l'essence ou le diesel, son stockage permet de pallier les carences de l'électricité et des batteries.


Plus d'autonomie et pleins effectués plus rapidement, voilà des atouts pour les véhicules. Mais c'est également un atout de choix au départ de la chaîne d'alimentation. En effet, hors hydroélectricité, les autres sources d'énergies renouvelables comme le soleil ou le vent sont intermittentes. Et là, l'hydrogène peut vraiment servir d'élément tampon entre le producteur et le consommateur final.


Le saviez-vous ?

Quand BMW brûlait directement de l'hydrogène dans son moteur

Hydrogène
BMW Hydrogen7


Il s'agit de la BMW Hydrogen7 présentée pour la première fois au salon de Los Angeles en 2006. La voiture fonctionnait alors aussi bien à l'hydrogène qu'au super sans plomb. Il ne s'agissait donc pas de pile à combustible mais d'utiliser le gaz comme carburant.


Ce modèle était basé sur une 760Li. Son autonomie limitée de 200 km avec un plein d'hydrogène (500 avec la super 95) , l'obligation de recourir à de très gros moteurs ainsi que tous les problèmes liés à la distribution de l'hydrogène ont stoppé le projet. BMW a abandonné ce modèle en 2009 et a arrêté le développement des moteurs à combustion utilisant de l'hydrogène.